Le coton camerounais au scanner de Régine Levrat
Le coton camerounais au scanner de Régine Levrat
Comment
améliorer la production du coton au Nord-Cameroun en faisant de lui un
moteur de développement? C’est à cette question centrale que tente de
répondre le nouvel ouvrage de Régine Levrat, « Culture commerciale et
développement rural : L’exemple du coton au Nord-Cameroun », présenté
au public de Douala ce jeudi 27 octobre 2010 au Centre Culturel
Français. Véritable cours magistral que l’oratrice avait axé sur trois
principaux points. Tout d’abord, la production du coton-graine et sa
transformation. Introduite au Nord-Cameroun en 1950 par la compagnie
Française de Développement Textile (CFDT), la culture du coton a connu
une progression remarquable jusqu’en 2004, où sa production atteint les
300 000 tonnes. Il y est devenu le moteur de développement, tant à
l’échelle locale qu’au niveau régional et même national.
Le coton comme moteur de développement
Ce qui fait l’objet du deuxième point exposé par Régine Levrat. Au
niveau local, le coton est la principale source de revenu des paysans,
entre 75 et 80% de leur revenu comptabilisé. En plus de cela il faut
noter une véritable transformation sociale, notamment des familles, des
villages tout entiers et des groupements de producteurs. Au plan
régional, diverses activités sont désormais liées au coton et l’on
dénombre environ 2000 employés permanents à la Sodecoton. Par ailleurs,
le coton apporte une contribution essentielle dans l’économie de la
région, la Sodecoton ayant développé une politique qui a permis de
déplacer les populations de la région trop peuplée de l’Extrême-Nord
vers le Nord. Au niveau national, la culture du coton a facilité
l’approvisionnement en huile et tourteaux, et a développé l’industrie
textile, même si celle-ci reste encore très peu compétitive, aux dires
de l’auteur.
Présentant l’évolution de la production du coton au Cameroun, l’auteur
mentionne qu’elle a connue une croissance régulière jusqu’en 1969 avec
un premier record de 90 000 tonnes et un rendement de 850 kilogrammes
par hectare. La production a connue son pic en 2004 avant de chuter de
manière drastique à partir de 2007. Une chute due selon Régine Levrat
aux coûts de plus en plus élevés des engrais, à la chute des cours de
la fibre et l’échec de l’Organisation Mondiale de Commerce (OMC). A
partir de ce moment, la production qui était de 300 000 tonnes en 2004
passe à 125 000 tonnes en 2009, le nombre de producteur passe de d’au
moins 300 000 en 2004 à moins de 200 000 en 2009. Les rendements par
hectare passent eux de 1230 kilogrammes en 2004 à près de 1000
kilogrammes en 2009.
Les répercussions
Elles son graves, affirme l’auteur. Et le gouvernement a mis du temps,
mais en a finalement pris conscience, poursuit-elle. Chez les
producteurs, il y a une perte de la rentabilité de la culture. Le prix
du kilogramme de coton-graine est passé de 140Fcfa en 1985 à 200Fcfa en
2010. Au niveau de la région, l’on observe une diminution de la
production vivrière, un effondrement de l’économie et une dégradation
de la santé et de la scolarisation, une aggravation de la corruption et
de la délinquance, ajouté à cela l’exode rural. Cette chute est aussi à
mettre à l’actif de la récente crise économique mondiale qui a changé
la politique de subvention des grands producteurs que sont entre autres
les Etats-Unis et la chine, en plus de la montée des coûts des
intrants. Au point où l’Etat subventionne les engrais depuis deux ans
au Cameroun.
Mais un espoir pour la Sodécoton
Les cours ont haussé depuis le début de l’année, rassure l’auteur, ce
qui augure des lendemains meilleurs pour la société. Pour surmonter la
crise, Régine Levrat propose entre autres de lutter contre les
subventions, améliorer la compétitivité du coton. Ce qui passe par le
progrès des rendements, en baisse du fait de l’usure des sols et de la
diminution de la consommation d’engrais. Il convient aussi, conseille
l’auteur, de rechercher une agriculture durable, et à ce sujet les
producteurs doivent essayer une sécurité foncière, valoriser la fibre
par une politique de label misant sur la qualité, diversifier les
cultures, en particulier dans les régions les plus sèches.
© Journalducameroun.com
Régine levrat