Contrebande : Le "Zoua Zoua" carbure à Maroua
En raison de l'augmentation des prix sur le marché local, les onsommateurs se tournent vers le carburant nigérian.
Avec l'augmentation des cours du pétrole brut sur le marché international, la consommation du carburant dans la province de l'Extrême-Nord a pris un sérieux coup. Ils ne sont plus très nombreux, en effet, les propriétaires de véhicules et autres engins à prendre le chemin des Stations-service implantés à Maroua. Fadil Boubawa, commerçant au marché central de la ville confie : "J'ai réduit ma consommation en essence au strict minimum parce que, comme vous le constatez, le carburant coûte cher et nous n'avons pas toujours assez de moyens pour faire face à nos besoins".
A la station Total de Domayo, hormis les gros porteurs et les véhicules administratifs, ceux des grandes entreprises de la place, ils sont très peu nombreux, les conducteurs de motos à venir s'approvisionner ici. Le gérant de la station-service raconte : "Depuis que le prix du litre d'essence est estimé à 585 francs Cfa, nous n'avons plus le même volume de travail d'il y a trois mois. Les véhicules privés et la plupart des motos taxis préfèrent s'approvisionner auprès des vendeurs installés en bordure des routes. Ce qui nous cause un manque à gagner énorme". Pour Souley Baba Issa, conducteur de moto, "Nous faisons le commerce et recherchons forcément le moins cher. Le carburant que nous achetions à la station n'est pas aujourd'hui à la portée de toutes les bourses. C'est pourquoi l'ensemble des motos taximen utilisent le Zoua Zoua (essence d'origine nigériane issu de la contrebande) qui lui est plus accessible." Un avis que partage l'essentiel des exploitants de motos taxis.
Concurrence
Au quartier Baoliwol, le long du bitume qui jouxte la localité, plusieurs jeunes gens ont, en effet, érigé des étagères sur lesquelles sont exposées des bouteilles contenant de l'essence. Au nez et à la barbe des forces de l'ordre. Un entonnoir de fortune sert à transvaser le liquide dans le réservoir de l'engin. Plusieurs motos et véhicules s'y immobilisent pour se ravitailler en carburant. Le prix, contrairement à celui pratiqué dans les stations, oscille entre 450 et 475 Fcfa, selon le "centre" de distribution.
Albert Brey, connu dans la ville en raison des grandes quantités d'essence qu'il importe, indique que "le litre d'essence à Maiduguri coûte environ 270 Fcfa. A Banki, c'est généralement à 380 francs Cfa que nous achetons le litre d'essence. C'est pourquoi nous le vendons aussi à des prix abordables. Au prix de gros, le litre est ainsi revendu au Cameroun à 400 ou 425 francs Cfa, selon qu'il a été acheté à Maiduguri ou à Banki. On intègre dans ce prix les frais de transport et de déclaration en douane."
La disparité des prix ainsi observée tient aussi à l'implication des contrebandiers dans le secteur de l'importation de l'essence. Echappant aux barrières douanières, ils sont "exonérés" des frais d'importation et peuvent ainsi casser les prix sur le marché local. On a par exemple pu apercevoir, à Palar, la vente du litre d'essence à 425 Fcfa, "ce qui ne se fait nulle part ailleurs dans la ville" a tenu à préciser Albert Brey.
Dans les services du secteur des douanes de l'Extrême-Nord, les responsables raassurent que tout est mis en oeuvre pour que tous les importateurs du "zoua zoua" passent par les guichets de la douane. Selon ces derniers, une brigade mobile se déploie d'ailleurs sur le terrain pour traquer les hors-la-loi. A Limani, principal pôle d'entrée du carburant d'origine nigériane, le dispositif aurait déjà permis de démanteler plusieurs réseaux.